Ou trouver un psychanalyste non cérémonieux?

Je suis sujet depuis l'age de 12 à des crises de larmes violentes, inexplicables et déconnectées de la réalité. Ces crises arrivaient deux à trois fois par an jusqu'à l'age de 28 ans. Puis elles sont arrivées tous les mois, puis toutes les semaines, - j'ai alors consulté un psychiatre comportemental - et enfin tous les jours... et j'ai commencé à prendre du citalopram (antidépresseur) ce qui a résolu radicalement le symptôme. Aujourd'hui, j'ai 31 ans, j'ai arrêté le citalopram depuis un an et je n'ai eu que deux ou trois crises de larmes depuis. Tout est redevenu comme avant.... mais j'aimerais maintenant résoudre le problème de fond.

Je suis donc allé voir un psychanalyste pour m'aider à extraire le problème qui est certainement enraciné dans mon enfance et certainement refoulé. A priori, c'est exactement ce qui peut être traité par une psychanalyse, mais ce sera à lui de me le dire, je ne préfère pas me diagnostiquer moi-même.

On m'avait dit que les psychanalystes en France avaient une approche particulière... Des druides plus ou moins modernes se transmettant leur savoir lors de rituel magique dans une langue secrète. Des mages connaissant les profondeurs sinistres de l'esprit, et revenant parmi nous pour guider les humains qui venaient vers eux, avec de considérables efforts pour interagir avec notre monde et s'exprimer dans notre langue... Mais bon, il ne faut pas croire les rumeurs.

Je vais donc à mon premier rendez-vous et je suis tout de suite rassuré. C'est un homme en costume qui me reçoit, dans un salon tout à fait de notre époque ou au pire du siècle dernier seulement. Il ne n'exprime pas beaucoup et lorsqu'il le fait il est assez cérémonieux. Il parle du besoin primordial de cadre dans une thérapie : il faut que les séances soient espacées de 7 jours exactement, heure pour heure. Ceci fait penser à un rituel, mais peut aussi être tout à fait rationnel, il y a beaucoup de choses qui sont régulières dans notre corps et dans notre esprit. La thérapie comportementale en parlait déjà... Seulement, aujourd'hui ce n'est pas présenté de façon rationnelle. Je lui demande d'ailleurs ce qu'il pense de la thérapie comportementale... Ah? il ne connait pas. Il n'a rien à dire dessus. Bizarre, il n'a pas l'air si jeune, pourtant, et c'est certainement un domaine de la médecine très proche du sien... Je pensais qu'il était important pour tout scientifique de regarder ce qui se passe dans la science en général et les domaines proches en particulier... Bref, au bout de quatre séances à 65€ chacune, je n'ai toujours pas de diagnostique, de méthode à suivre ou même de concept théorique d'un traitement possible et je commence à douter.

Je ne connais pas beaucoup la psychanalyse mais ce que j'avais appris en terminal, m'avait paru tout à fait rationnel : un traumatisme peut être refoulé dans l'inconscient, lorsqu'il est refoulé il est difficile pour le conscient d'y avoir accès. Cependant il peut resurgir dans les rêves, les angoisses, les actes manqués, les lapsus et les associations d'idées. La psychanalyse va conduire le patient à laisser aller ses associations d'idées pour faire remonter le traumatisme dans le conscient, l'identifier et le résoudre. Tout ceci paraît très logique et absolument compatible, complémentaire même, avec la thérapie comportementale.

Pourquoi alors tout ce mystère? Pourquoi le ton cérémonieux du religieux plutôt que le ton pragmatique du scientifique, du médecin? Mon psychanalyste m'a sous-entendu une explication rationnelle mais elle me paraît insuffisante: pour permettre les associations d'idées, nous devons absolument éviter la disjonction entre le conscient et l'inconscient. Il ne faut pas s'observer de façon froide et rationnelle mais plutôt se laisser aller de façon entière. Pour cela, le 'cadre' ne doit pas être artificiel, il ne faut pas prendre de recul par rapport au cadre.... Le problème, évidemment, c'est que nous ne sommes pas dupes. Une fois que le cadre est visible, c'est impossible de faire comme si on ne le voyait pas. Une fois qu'on a vu les ficelles, on ne croit plus au tour de magie. Le magicien-psychanalyste arrive-t-il à impressionner certains patients? Pour moi hélas, la technique purement mystique ne peut plus fonctionner.

Pourquoi ne pas avoir une approche rationnelle? Les psychanalystes anglo-saxons l'ont. Certes on risque une disjonction, on risque d'inhiber les associations d'idées en s'observant froidement, scientifiquement.... Mais l'inconscient est plus fort que ceci. Ce n'est pas un fantôme qui disparaît dès qu'on le regarde, c'est quelque chose de bien réel et bien concret, d'observable, d'après ma petite expérience sur le sujet. Lorsqu'on écoute de la musique connaître rationnellement la méthode, le mécanisme, ne diminue pas l'aspect merveilleux. L'esprit, comme la musique, a très certainement des aspects sacrés, voire divins, mais ceux-ci ne disparaissent pas avec une étude rationnelle. Le musicien risque certes d'être inhibé temporairement par la méthodologie, mais ce risque est vite surmonté car le merveilleux de la musique existe vraiment ; il est toujours accessible en utilisant la méthodologie et même d'autant plus accessible. De même, pour la psychanalyse, expliquer rationnellement la méthodologie n'empêche certainement pas d'atteindre l'inconscient...

L'impression que j'ai aujourd'hui donc, c'est que le risque de disjonction est surmontable et les psychanalystes mystiques aiment un peu trop l'intimidation spirituelle qu'ils pensent nécessaire à leur rôle.


Voici donc mes questions:
- est il possible d'entreprendre une psychanalyse avec une approche rationnelle ?
- si oui, où trouver un thérapeute qui ait une approche scientifique, que l'on puisse remettre en question et qui soit prêt à exposer les limites et les incertitudes de sa méthode ?