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Seule, enfermée dans mon mutisme

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Taediumvitae
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Seule, enfermée dans mon mutisme

Je ne sais pas très bien par où commencer, mais je crois que j'ai envie de voir si la parole est aussi cathartique qu'on le dit. Je n'y ai jamais vraiment cru, je me suis toujours dit qu'il vallait mieux mettre les peines de coté et serrer les dents en attendant de les oublier. Ca a marché, un temps, mais à l'évidence ce n'est pas miraculeux comme solution.

Je suis profondément malheureuse, dans une détresse que je peine à dissimuler. Depuis que je suis enfant je me suis évertuée à donner le change, à faire ce que l'on attendait de moi. J'ai été dressée pour ne surtout pas déranger, ne pas sortir du rang. Pour ce que je m'en souviens, je devais avoir sept ou huit ans lorsque j'ai pris conscience qu'il fallait que je maintienne mes résultats scolaires pour ne pas être démasquée. J'ai bien tout fait, j'ai même épargné la crise d'adolescence à mes parents pour ne pas les peiner et attirer l'attention.

Vers quinze ans j'ai eu envie de mourir plus que jamais, mais je me suis dit en toute objectivité que si j'étais en crise d'adolescence je n'en avais pas conscience et que l'état dans lequel j'étais n'était sans doute pas représentatif de ma vie future. Je me suis promis à moi-même de ne pas me tuer avant d'avoir 24 ans. Je me suis dit que d'ici là j'aurai trouvé le bonheur.

Je n'ai jamais été capable de parler de mon desespoir à qui que ce soit, j'en ai pourtant souvent eu envie, mais c'est au-delà de mes forces. Je suis d'une grande pudeur, tant physique que morale, et je ne me suis jamais dévoilée à personne.

Pendant ces années j'ai essayé de combler ma vie. Assez peu de choses sont essentielles.

Certains sont guidés par Dieu, mais je n'y crois pas. Je ne saurais dire s'il existe ou non, mais dans mon coeur je ne crois pas.

D'autres se lèvent le matin pour profiter de la présence de leur amour, mais je n'ai jamais connu ne serait-ce qu'un flirt. Longtemps cela m'a manquée, mais je m'y suis habituée et surtout je serais bien incapable de prendre soin d'une autre personne.

D'autres se jetent à corps perdu dans leur travail, un métier qui les épanouie, une activité qui a un sens. Même avec un Bac, il m'a fallu faire des pieds et des mains pour être ouvrière à la chaine.

Et puis il y a ce bonheur qui est parait-il ultime, celui de porter la vie, d'avoir un enfant. Je n'ai vraiment pas envie de me reproduire (dans tous les sens du terme), je ne voudrais pas imposer un monde si barbare et une mère telle que moi à l'être que j'aimerais sans doute le plus au monde. Et puis on ne fait pas un enfant pour voir si cela transcende sa vie. Avoir un enfant, ce serait me condamner à vie, m'enchainer à l'existence.

Alors avec quoi pourrais-je remplir ma vie, moi aui ai l'air si creuse au regard des gens? J'ai voyagé, la première fois j'ai été heureuse et surtout j'en ai eu conscience. Et puis je me suis lassée. J'essaye de vivre des choses mais finalement je suis toujours aussi vide.

Peut-être que certaines personnes ne sont pas capables d'être heureuses, après tout j'ai eu la chance de naître libre, de ne pas être mutilée au nom de pratiques ancestrales, je suis en bonne santé. J'ai conscience d'avoir ce que tant de gens n'ont pas, mais finalement au-delà de la culpabilité, je me dis que ce monde ne vaut peut-être pas la peine. Pourquoi se forcer à vivre? Je n'en suis peut-être pas capable.

J'ai conscience que l'étau se resserre autour de moi. Je sais qu'il est probable que cette absence d'envie de vivre soit pathologique, et pourtant je suis incapable de dire.

Lorsque j'étais adolescente, j'étais bien plus passionnée, je ressentais la vie intensément, et je n'aurais pas manqué de courage pour mourir. Mais aujourd'hui il m'arrive d'avoir peur de la mort, de la douleur. Mais ce qui me fait bien plus peur encore serait de ne pas mourir. Car alors quelle solution me resterait-il?

Je ne sais vraiment pas comment m'en sortir.

Je m'excuse très sincèrement de tout ce que j'ai écrit, mais au moins maintenant une personne sait que je suis malheureuse.

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